Les témoignages
Le 20 juillet 1821
Devant nous Jean Marie Villeneuve Bernard, juge de paix du canton de Pleurtuit et officier de police
judiciaire de ce lieu, arrondissement de Saint Malo, département d'Ille et Vilaine, chevalier de
l'ordre royal et militaire de Saint Louis, dans le lieu ordinaire de nos séances et notre dernière sise
au bourg de Pleurtuit assisté du sieur Jean Pierre Hulaud, notre greffier.
En vertu de la commission à nous transmise par Monsieur Pierre François Pitet, juge d'instruction
de l'arrondissement de St Malo, département d'Ille et Vilaine, sous la date du seize juillet présent
mois qui nous indique les noms et le nombre des témoins à entendre sur l'accusation portée contre
François Esnoux, mendiant, demeurant à Saint Briac, prévenu d'avoir, le deux de ce mois à la
Chataignerie, sur le grand chemin de Saint Malo à Matignon, grièvement maltraité Jacques Lagneau
et de lui avoir volé un bissac contenant 6 francs 55 centimes et conformément à la cédule par
nous délivrée à cet effet le 19 de ce mois.
Sont comparus les ci-après nommés, lesquels avant d'être entendus nous ont individuellement
représenté la citation qui leur a été donnée pour déposer après quoi, ils ont prêté serment de dire la
vérité, toute la vérité et rien que la vérité, sur les faits contenus en ladite commission dont il leur a
été donné lecture par notre greffier et ont été entendus séparément hors présence les uns les autres
et de celle du prévenu comme suit :
Le nommé Jean Pierre Collet, laboureur, âgé de 67 ans et demeurant à la Garde commune de St
Briac, dépose : bien connaître le nommé François Esnoux et que revenant d'une foire auprès de
Plancoët, avec des bestiaux, arrivé à l'endroit de la Chataignerie, ayant quitté la grande route pour
prendre le chemin qui conduit chez lui, à 2oo pas environ de la grande route, il aperçut Lagneau
tombé dans le chemin et ensuite il vit Esnoux sur Lagneau lui donnant un coup de règle sur la tête.
Il lui en donna un second coup sans que Lagneau n'ait rien dit, et lui déposant arrivé à eux
demanda à Esnoux pourquoi il frappait cet homme. Esnoux lui répondit qu'il voulait le tuer. Il arriva
sur cette entrefaite plusieurs particuliers et ses bestiaux ayant décampé devant, il poursuivit sa
route. Il déclare n'avoir aucune connaissance du vol de bissac ni de l'argent. Il déclare aussi que
Lagneau était couvert de sang.
Le second témoin, François Lefevre, domestique chez Jean Pierre Collet, précédent témoin, âgé de
17 ans, dépose qu’ en revenant d'une foire près de Plancoët, rendu à un chemin près du pont
Briand qui conduit à la Chataignerie et chez lui, il vit les enfants de Lamiré qui couraient et criaient
"ils sont à se battre ". Il courut aussi et, rendu à environ 200 pas de la grande route, qu’ il vit
Lagneau renversé par terre et Esnoux dessus qui lui donnait des coups de poings et qu'il vit le dit
Esnoux, après avoir quitté Lagneau, s'emparer d'un bissac et du bâton de Lagneau et s'enfuir dans le
champ voisin.
Peu de temps après, le dit Esnoux revint et courut sur Lagneau avec son bâton et lui asséna 2 coups
sur la tête. A chaque coup, il entendait Lagneau crier qu'il était mort, cependant, il se releva tout
couvert de sang, suivit Esnoux à une certaine distance pour s'échapper de ses mains et qu'il le
quitta probablement pour s'en retourner chez lui. Le dit témoin ajoute avoir entendu Esnoux dire
qu’il voulait tuer Lagneau.
Le troisième témoin, Gilles Lamiré, 21 ans, laboureur, demeurant au Clos, commune de Pleurtuit,
dépose qu'étant à couper de la litière sur la grande route près du Pont de Briand, à l' endroit qui
conduit d'icelle grande route à St Briac, il vit Esnoux et Lagneau arriver, qu'il lui parut qu'ils se
disputaient depuis longtemps. Rendu au vis a vis de lui, Lagneau mit sa poche par terre et dit à
Esnoux de marcher devant ou derrière et que s’il avançait il lui casserait le tête. Esnoux avait un
gros bâton carré, Lagneau reprit sa poche et tous deux entrèrent dans le chemin qui conduit à
Saint Briac. Quelques temps après, ayant entendu du bruit, il courut avec son frère et arrivant à
peu près à 200 pas de la grande route, il vit Esnoux sur Lagneau "s'entretenant" aux cheveux, que
Lagneau lâcha Esnoux et lui dit qu'il ne lui en voulait pas, que s'étant séparés, Esnoux s'empara du
bissac de Lagneau et s'échappa dans les champs voisins. Un instant après, il vit Esnoux revenir et
courir sur Lagneau, lui donner 2 ou 3 coups de bâton sur la tête. Sur ces entrefaites, arriva Jean
Collet et son domestique, Lagneau se releva et les suivit. Esnoux était à les attendre un peu plus loin
et tournait autour d'eux pour rattraper encore Lagneau. Collet ayant été obligé de suivre ses
bestiaux qui s'échappaient, il les quitta. Esnoux donna encore 2 coups de bâton à Lagneau et fit
tomber le chapeau de sur sa tête dont il s'empara. Le témoin et son frère ramenèrent Lagneau
pour lui procurer les moyens de s'échapper. Il entendit Esnoux dire qu'il fallait que l'un d'eux fût
guillotiné.
Le 4ème témoin, Louis Lamiré, âgé de 19 ans, laboureur, demeurant au Clos, commune de
Pleurtuit, va déclarer les mêmes faits que son frère, Gilles Lamiré.
Le cinquième témoin, Laurent Le Coureur, âgé de 51 ans, laboureur, demeurant à la Ville es
Mariniaux en St Briac, dépose qu'il y a environ 3 mois partant de chez lui sans pouvoir se rappeler
positivement le jour, il fut poursuivi par François Esnoux qui avait un gros bâton à la main, que ce
dernier lui dit " tu es bien heureux que je ne t'ai pas trouvé plus tôt et sans que voilà du monde,
jamais tu n'aurais été plus loin, je t'aurais assommé de coups de trique et jamais tu ne mourras que
de ma main toi et ton fils, je t'assassinerai de quelque manière que ce soit, quand je devrais te
plonger un couteau dans le cœur ". (dixit)
Le 6ème témoin, René Touzé, 27 ans, tisserand, demeurant à la Ville es Mariniaux commune de
St Briac, va déclarer connaître parfaitement François Esnoux, demeurant dans la même cour que
lui. Il y a environ deux mois, sans parvenir à se rappeler positivement du jour, Lagneau avait acheté
de la paille avec Esnoux et que sur les conditions du marché, Lagneau devait payer une bouteille de
cidre. Se trouvant chez Lagneau, Esnoux s'y rendit et demanda à Lagneau s'il allait payer sa
bouteille de cidre promise, que Lagneau répondit par l’affirmative, aujourd'hui comme un autre
jour. Esnoux pria René Touzé d'aller en prendre sa part. Il refusa mais après plusieurs sollicitations
de part et d'autre, il consentit à y aller. La première bouteille bue, Lagneau en paya une seconde et
lui déposant, une troisième. A son tour Esnoux en offrit une quatrième, lui dit qu'il voulait lui
parler en particulier et l'emmena dans le jardin où il le prit au collet et chercha à le rosser. Il
appela Lagneau à son secours, qui arriva et le débarrassa. Ensuite ils rentrèrent tous trois dans le
cabaret et voulant s'en retourner chez lui, il sortit. Esnoux le suivit dans la cour et l'engagea d'aller
boire avec lui à la Houlette dans un autre cabaret.
Ayant absolument refusé, Lagneau et Esnoux s’en furent boire ensemble. La fille Lagneau alla
trouver le témoin chez lui pour le prier d'aller chercher son père au dit cabaret. Il y fut et
demanda une chopine de cidre, mais il ne put jamais ramener Lagneau car Esnoux le retenait
toujours. Etant dans "l'aire" pour s'en retourner, il entendit du bruit dans la maison et y rentra. Il
vit alors Esnoux et Lagneau qui se tenaient au collet, les départagea et emmena Lagneau chez lui.
Rapport de l’officier de santé
Le 22 juillet 1821
Jean Marie Villeneuve Bernard, juge de paix et officier de police judiciaire du canton de Pleurtuit,
chevalier de l'ordre Royal et militaire de Saint Louis, se " transporte " au village de la Ville es
Mariniaux, en Saint Briac, pour y visiter le nommé Jacques Lagneau, en compagnie de monsieur
Cabaret, officier de santé demeurant à Ploubalay, pour une 2ème visite. Ils trouvent le dit Jacques
Lagneau, couché. Monsieur Cabaret va donner son avis : " premièrement, la cicatrice d'une blessure
avec contusion aux téguments qui recouvrent l'os coronal; secondement, une autre cicatrice
résultant d'une semblable plaie située à la partie postérieure et supérieure du crane; troisièmement,
la disparition complète des meurtrissures de la face ; quatrièmement, l'entière terminaison des
symptômes qui annonçaient dans le principe une commotion cérébrale.” Déclare en outre : " que de
ces divers accidents il ne reste au dit Lagneau qu'une légère difficulté de mouvoir le bras droit et
qu'on pourra dissiper en 8 jours par un traitement convenable et régulièrement suivi. ".
Pour résumer : Lagneau va beaucoup mieux … Cabaret pour l’officier de santé, ça ne s’invente pas !
Interrogatoire de François Sophie Esnoux
Le 11 août 1821
Question : Nom, prénom, âge, profession et demeure.
Réponse : je me nomme François Sophie Julien Esnoux, 39 ans, tenant assez ordinairement dans les
foires un biribi ou plutôt une loterie, demeurant à Saint Briac. Je fais ce que je peux pour donner
du pain à ma femme et à ses enfants; je suis infirme par suite d'une chute sur les reins que
j'éprouvais il y a environ dix ans au fort de Châteauneuf ou je servais comme garde-côtes. Je fus
réformé un an après.
Question : N'êtes-vous pas dans l'usage de mendiant avec menaces et violences. ?
Réponse : Je mendie mais sans menaces et violences, j'ai seulement dit aux riches qui me refusaient,
vous êtes des ingrats.
Question : N'est-il pas vrai que le 2 juillet dernier vers sept heures du soir vous rencontrez Jacques
Lagneau dans le chemin qui conduit de la grande route au bourg de Saint Briac et que de propos
délibéré vous le " frappâtes" d'une règle, vers le ventre par terre, vous lui " donnâtes" des coups de
poings redoublés ?
Réponse : Allant au marché de Ploubalay, je trouvais vers 9 heures du matin Lagneau qui en
revenait. Il m'a dit qu'il n'y avait point de maquereaux. J’allais en acheter pour ma femme malade.
Nous revînmes ensemble, nous nous arrêtâmes au cabaret de la Licorne, près du pont Briand, nous
y bûmes 4 pots de cidre; " un mien cousin" survint, but avec nous et au bout de quelque temps,
Lagneau lui chercha querelle mal à propos ; nous sortîmes après avoir payé le cabaretier. J’en
payais 3 pots; comme je lui disais qu'il avait eu tort de faire des reproches à mon cousin, il voulut
me donner plusieurs coups de bâton, que je parais. Rendus dans le petit chemin qui conduit de la
grande route à Saint Briac, je lui dis d'aller devant ou derrière, que je ne voulais pas aller avec lui ;
il alla derrière pendant quelque temps mais ne tarda pas à me dépasser ; il mit un sac par terre,
qu'il portait et me dit que je si j'avançais il allait m'assommer de coups de bâton. Comme j'étais
échauffé par la boisson, j'avançai néanmoins. Il me porta un coup de bâton sur le bras que je ne puis
parer parce qu'il m’ avait cassé un bâton, en me portant plus de 20 coups que j'avais parés; il me
porta un second coup de bâton sur la tête qui me fit saigner beaucoup, cela m'irrita de telle
manière que je lui portai un coup de mon petit bout de bâton sur la tête, ce qui le fit tomber. Je
jetai mon bâton et me précipitai sur lui pour l'empêcher de se relever. Il me dit de le lâcher, ce que
je fis et j'allai laver ma plaie.
Question : N'est-il pas vrai au contraire que vous frappâtes Lagneau de propos délibéré et que quand
vous l’eûtes excédé de coups, alors qu’il était à terre, vous prêtez [prenez] un bissac qu'il portait et
qui contenait un écu de 6 livres et 55 centimes en billon ; que vous lui prêtez [prenez] en outre
son chapeau et son bâton ?
Réponse : Je pris une poche que Lagneau avait mis par terre et je la jetai dans une prairie qui était
près de nous en lui disant " va la chercher"; il eut été bien étonnant qu'il eut mis une pièce de 6
livres et quelques monnaies dans un sac pouvant contenir " trois quatre de blé " ; il est
possible que j'ai jeté aussi son bâton et son chapeau dans la prairie, mais je n'ai rien emporté; j'avais
plus d'argent que Lagneau à ce moment. J'avais plus d'un louis sur moi.
Question : On vous a vu emporter le bissac de Lagneau, vous revîntes et lui assenâtes plusieurs
coups de bâton. Des personnes survinrent et vous empêchèrent de continuer. Un des témoins s'étant
éloigné, vous revîntes à la charge et vous le frappâtes encore de votre bâton.
Réponse : On n’a pas pu me voir emporter le sac; je frappai 2 fois Lagneau, son procédé m'ayant
mis en colère; il m'avait bien également frappé à 2 reprises.
Question : N'est-il pas vrai que vous en vouliez à Lagneau depuis environ 3 mois, alors qu'il vous
sépara d'avec Touzé, que vous étiez à maltraiter ?
Réponse : Touzé et moi sommes compères. Je ne battrai point Touzé, je me contentais de lui
représenter qu'il avait tort d'abandonner son père comme il faisait, et je lui reprochais de me devoir
une petite somme qu'il me devait pour lui avoir appris à lire.
Question : N'est-il pas vrai qu'il y a environ 4 mois vous rencontrâtes dans un chemin, Roland Le
Coureur, que vous lui dites "qu'il était bien heureux qu'il se trouva là quelqu'un, parce que vous
l'auriez assommé à coups de trique" et que vous le menaçâtes, lui et son fils, de ne mourir que de
vos mains ?
Réponse : Je lui reprochais de m'avoir laissé à 8 lieues de mon pays. Il m'avait effectivement
abandonné après m'avoir engagé à venir mendier avec lui sur un certificat qu'il avait obtenu de son
maire, comme incendié, ou plutôt c'était le fils Le Coureur qui m'avait abandonné et je reprochai
cela à son père, mais je ne le menaçais point.
Question : Vous avez été repris de justice ?
Réponse : Non
Tel est son interrogatoire, duquel lecture faite, il a dit y persister et a signé avec nous.
Quelle belle signature !
Déposition de Jacques Lagneau
Le 27 août 1821
Jacques Lagneau, 64 ans, tisserand, demeurant à Sant Briac, dépose qu'un lundi dans le
commencement de juillet vers l'heure de midi, alors qu’il revenait du marché de Ploubalay où j’étais
allé pour trouver du blé noir et de la toile mais que je n'achetais pas. Je m'en revenais avec un
grand sac sous le bras dans lequel il y avait 6 livres 15 sous en une pièce de 6 livres et le reste en
sous lorsque, à une portée de fusil du marché, je trouvais François Esnoux qui me demanda si j'avais
vu du maquereau à Ploubalay, disant qu'il en prendrait pour sa femme. Je lui dis que je n'en avais
pas vu et il s'en revint avec moi. Quand nous eûmes fait ensemble environ une demi-lieue, il s'éleva
une dispute entre nous qui vint de ce qu’il disait sur Guy Josselin, demeurant à Ploubalay, dont nous
rencontrâmes alors le fils nommé aussi Guy, qu’il était un coquin parce qu'il ne voulait pas lui
donner du pain. Je soutins que ce propriétaire, chez qui, moi et mon frère, avions été domestiques,
était un honnête homme. Il persista à me dire que c'était un coquin, ajoutant qu'il mériterait d'être
brûlé vif et moi aussi. Nous ne tardâmes pas à quitter la grande route pour prendre le chemin qui
conduit à St Briac et lui dis alors d'aller devant ou derrière, ne voulant plus de sa compagnie. Il se
mit à jouer du bâton ou plutôt à agiter une règle de charpentier qu'il avait en ses mains. Je tendis
mon bâton devant moi pour éviter son coup, il me fit sauter ce bâton des mains avec sa règle et il
me porta un coup à la tête, ce qui me fit tomber dans une douve. Il se jeta alors sur moi et me
donna des coups de poings à la tête. Les frères Lamiré qui étaient à couper des joncs dans le chemin
de St Briac virent toute cette scène, prendre mon sac avec ce qu'il contenait, mon chapeau et mon
bâton et aller les cacher dans un pré touchant le chemin, puis revenir ensuite me frapper avec sa
règle, ce qui me fit tomber de nouveau car je m'étais relevé. Jean Collet et son domestique qui
ramenaient de Pleurtuit une vache et un cochon virent aussi une partie de ce maltraitement. Je
tournais autour de Collet pour éviter la "continuation"; Collet dit à Esnoux de ne pas me frapper
mais il fut obligé de nous laisser pour courir après une vache. Esnoux m'abattit une troisième fois
avec sa règle. Les frères Lamiré me donnèrent la main pour monter sur un fossé et me donnèrent le
moyen de lui échapper. Il disait qu'il voulait me tuer.
Nous avons demandé au témoin s'il n'est pas vrai qu'il entra avec Esnoux au cabaret dit "Les Lions",
près du pont Briand, s'ils n'y burent pas ensemble 4 pots de cidre, si un cousin d' Esnoux ne but pas
pendant quelque temps avec eux, si lui, Lagneau, ne chercha pas querelle à ce cousin, si Esnoux ne
paya pas à lui seul 3 pots de cidre, si lui, témoin, ne voulut pas porter des coups de bâton à Esnoux
parce qu'il lui reprochai d'avoir querellé son cousin mal à propos, si rendu dans le petit chemin qui
conduit à Saint Briac, Esnoux ne lui dit pas d'aller devant ou derrière, si lui, témoin, mettant son
sac par terre ne menaça pas Esnoux de l'assommer de coups de bâton, si ensuite, il ne lui donna
pas un coup de bâton d'abord sur le bras et ensuite plus de 20 autres coups, notamment un à la
tête qui le fit saigner beaucoup ?
Le témoin répondit : " il est vrai que nous entrâmes au cabaret du Lion, je voulais boire seul et y
demandais une moque . Esnoux s'en empara, en but une partie et me donna le reste. Il demanda
ensuite une autre moque dont il but une partie et qu'il me passa ensuite. Il demanda une bouteille
de cidre que nous bûmes. Fayet, cousin germain de sa femme, but avec nous. Je n'eus point
dispute avec Fayet. Nous bûmes 3 pots et une bouteille. Je ne voulais pas boire tant mais Esnoux
m'ayant reproché " que je voulais sortir sur le vin des autres ", parce qu'il avait payé une bouteille
de plus que moi, me fit en demander une nouvelle ce qui nous conduisit, les uns et les autres, à nous
enivrer. Toutes les autres questions que vous m'avez faites portent sur des faits que je nie.
Nous avons demandé au témoin s'il n'est pas vrai qu'il ait retrouvé son sac et son chapeau, qu’
Esnoux n'ayant fait que le cacher ?
Le témoin répondit : il est bien vrai qu’ Esnoux avait de l'argent et qu'il m'en montra, il n'en est pas
moins vrai qu'il prit mon sac et mon argent et que je ne l'ai jamais retrouvé, pas plus que mon
chapeau. Ses enfants ont dit aux miens qu'il avait brûlé mon chapeau.
Deuxième lettre du maire
Saint Briac, le 24 août 1821.
Le Maire de la commune de Saint Briac à Monsieur le juge d'Instruction de l'arrondissement de
Saint Malo
Monsieur le Juge,
D'après le lettre que vous « mavés »
Pas un champion en orthographe, le maire !
[m'avez] adressée concernant le nommé Esnoux François arrêté et détenu dans la prison de la ville
de votre résidence, j'ai l'honneur de vous répondre, selon votre désir, que de par ma dernière, je
vous ai désigné les sieurs Etienne, Soulier et Guerin, le premier domicilié en cette commune et le
deuxième en celle de Ploubalay ; ce n'était pas par rapport à l'affaire de Lagneau mais bien pour
contribuer à prouver, évidemment, que l'accusé est coupable de plusieurs délits.
Je crois devoir ajouter aux indications précédemment fournies à cet égard, que les sieurs Laisné,
laboureur demeurant à Beaurepaire, Pierre Blavon, marin, en ce moment absent, Tavez de la Ville
es Monniers et Perrine Grossetête de la Duché commune de Saint Briac, la fille de Jeanne Harquin,
Jean Guguen et Jean Rebufet de Pleurtuit qui m'ont été également indiqués depuis, serviront à
attester l'immoralité d' Esnoux craint généralement, parlant de tous les honnêtes gens qui le
connaissent et à se convaincre de ses torts; au surplus, dans votre sagesse, il vous plait de juger bon
de votre autorité pour faire paraître devant le tribunal tous ceux que je vous dénomme par la
présente, leur témoignage plus ou moins à charge contre l'individu dont il s'agit, éclairera la justice.
Je ne puis donc que m'en référer à ce que j'ai déjà dit relativement à sa conduite.
Agrées [agréez] je vous prie Monsieur le Juge l'assurance de mes sentiments très respectueux.